Là où BMW annonce sa solution eCall, non disponible en France, la solution équivalente proposée par Liberty-Rider est déjà opérationnelle. Nous avons contacté Emmanuel PETIT, fondateur de Liberty-Rider, pour en savoir plus. Et il faut avouer que leur solution nous a particulièrement séduit !
Genèse
Liberty Rider a été créé en novembre 2015 à l’initiative d’Emmanuel PETIT qui souhaitait initialement rassurer ses proches quant à sa sauvegarde personnelle pour ses trajets quotidiens à moto sur de petites routes pas forcément toujours en bon état et gravillonnées autour de Toulouse. Il a parlé de cette idée à ses amis motards, puis à tous les motards qu’il rencontrait dans les magasins et concessions ainsi que sur des lieux de regroupement de motards. Il est sorti conforté de cette première « étude de marché » qu’il existait un réel besoin chez les motards sur ces sujets.
Pouvoir un jour rassurer en permanence ses proches quand on roule à moto et, le cas échéant, que les secours soient alertés dès la survenue d’un accident ou d’une chute pour une intervention rapide avec des soins adaptés jusqu’au transport à l’hôpital pour une prise en charge complète. Car plus on intervient vite plus les conséquences sont limitées. Et prévenir les proches d’une part que la balade ou le trajet s’est déroulé sans problème et, le cas échéant, qu’en cas d’accident ou de chute les services d’urgence sont bien intervenus et qu’on est hospitalisé à tel endroit est un complément essentiel à la prise en charge médicale elle-même.
Suite à cette première étude de marché qui s’est faite sur septembre octobre 2015, le fondateur s’est associé en novembre l’aide de deux ingénieurs, Jérémie et Martin. Le premier a amené ses compétences de codage et le second ses compétences de traitement du signal. Ils ont été rejoints en février 2016 par Julien qui a apporté ses compétences de gestionnaire pour structurer cette startup Toulousaine.
La première version béta de leur application était disponible sur Androïd dès février 2016, puis la version officielle en juin suivant : au total elle a été téléchargée plus de 30.000 fois à mi-octobre 2016. La version officielle pour iOS, disponible depuis début octobre 2016, a été téléchargée plus de 5.000 fois en seulement 15 jours ! L’utilisation actuelle de cette application gratuite Androïd + iOS varie entre 3.000 et 5.000 trajets par semaine.
Fonctionnement
Cette application utilise la puce GPS et l’accéléromètre intégrés dans tout smartphone du marché.
La puce GPS donne en temps-réel la position exacte du smartphone, donc du motard qui la porte, et elle permet de calculer sa vitesse de déplacement ainsi que déterminer s’il se déplace ou s’il ne bouge plus. Ces informations sont utilisées pour déterminer l’activité (déplacement) ou l’inactivité (immobilité) du smartphone ainsi que pour le localiser précisément ce qui est essentiel pour informer les premiers secours du lieu exact où se rendre pour intervenir.
L’accéléromètre permet de mesurer les accélérations et les décélérations, le but étant d’identifier les brusques chutes de vitesse jusqu’à l’arrêt total qui peuvent indiquer un choc ou une chute.
Ces signaux sont analysés en temps-réel par l’application installée sur le smartphone à partir de scénarios. Pour déterminer ces scénarios et les conditions exactes de leur utilisation, l’équipe fondatrice a réalisé plus d’une centaine de crash tests avec un mannequin dans divers circonstances représentatives de la réalité d’accidents et de chutes à moto. A partir des informations collectées ils ont pu établir des profils qui servent de référence au moteur d’analyse des signaux (vitesse et décélération) pour identifier les situations à forte probabilité d’accident ou de chute. Comme un algorithme ne peut tout prévoir, il fallait nécessairement passer par une étape de validation avant d’alerter les premiers secours et de prévenir les contacts associés au profil du motard.
C’est donc l’équipe des 4 fondateurs qui se relaie à tour de rôle jour et nuit pour analyser les alertes reçues et, après vérification, faire le nécessaire. Le risque avec ce type d’approche c’est soit d’avoir trop de faux positifs (fausses alertes) soit trop de faux négatifs (alertes justifiées non détectées) avec les conséquences qui en découlent : dans le premier cas oon perd vite toute crédibilité, dans le second cas ce sont de vrais accidents ou chutes non détectés et des vies potentiellement perdues.
Ethique et souci d’efficacité ont fait pencher la balance en faveur des faux positifs, donc chaque alerte est remontée sur la plateforme de l’équipe qui cherche d’abord à vérifier le scénario puis à appeler le motard pour valider ce qui s’est réellement passé. Si le motard répond et qu’il précise que tout va bien ou qu’il a bien eu un accident ou chute mais qu’il n’a pas besoin d’aide, alors aucune suite n’est donnée à l’alerte. Sinon, la plateforme appelle les services d’urgence (SAMU, Pompiers) en leur transmettant toutes les informations pour qu’ils interviennent. En parallèle, selon ce qui a été paramétré dans l’application par le motard concerné, ses contacts sont prévenus et rassurés sur le fait que les services d’urgence sont en cours d’intervention. De leur côté, les services d’urgence disposent également des coordonnées des personnes à contacter.
L’équipe est en relation avec les services des SAMU et Pompiers sur la France entière qui connaissent cette application et traitent donc très sérieusement tous les appels de la plateforme.
Modèle économique
Se pose bien entendu la question du « qui finance cette affaire et quel intérêt en tirent les fondateurs ? ».
La motivation des fondateurs n’a pas varié : ils veulent fournir un service gratuit à tous les motards afin d’assurer leur sauvegarde et, le cas échéant, faire intervenir les services d’urgence et de secours ainsi qu’informer leurs proches. Cette fonction « de base » de l’application, qui consiste à sauver des vies, demeurera gratuite.
Mais ils ont des contraintes à gérer, notamment la tenue d’une plateforme qui fonctionne nuit et jours 365 jours par an pour recevoir les alertes et les traiter, ce qui représente une charge de travail lourde et des frais de fonctionnement. Le projet est donc de sous-traiter cette fonction à un centre d’appels spécialisé sur la base d’un cahier des charges qui existe déjà.
D’un autre côté, ils souhaitent faire évoluer leur application en lui adjoignant de nouvelles fonctionnalités qui devraient intéresser les motards et donc les annonceurs qui financeraient son développement et son fonctionnement. Pour l’instant ces projets restent confidentiels.
Quel avenir ?
L’équipe de Liberty Rider souhaite que son application devienne LE standard pour les motards, et pourquoi pas qu’elle soit également utilisée par d’autres populations comme les scootéristes (parents qui vont au travail et enfants qui vont à l’école) et automobilistes, ce qui reviendrait à entrer en concurrence avec d’autres solutions existantes ou à venir. On pense évidemment à la solution « eCall » que BMW a installée en standard sur toutes ses nouvelles voitures (obligation européenne à partir de 2018 pour les voitures mais pas pour les motos) et en option payante départ usine sur ses motos à partir de 2017.
L’équipe a des relations avec la Sécurité Routière où elle fait des présentations de sa solution, et elle travaille en lien avec l’organisme européen qui gère le 112 (numéro d’appel d’urgence international) afin de se tenir informée pour que sa technologie soit compatible et donc utilisable partout en Europe.
Conclusion
On ne peut que se féliciter de voir une solution française être capable de rivaliser avec celles des multinationales, surtout quand elle est faite par des motards pour des motards et avec un modèle économique qui équilibre éthique (sauver des vies gratuitement) et développement (trouver des financements pour mieux fonctionner et se développer). Et si nos quatre fondateurs arrivent en plus à en vivre bien, ce sera tant mieux !
Nous sommes particulièrement séduits par l’approche de cette solution qui est différente de celle proposée par le eCall de BMW : d’un côté tout est gratuit car tout motard dispose d’un smartphone et l’application est gratuite et c’est déjà opérationnel sur toute la France, de l’autre il faut tout payer (l’option départ usine + l’abonnement au service + l’abonnement à l’opérateur puisque l’eCall utilise le réseau cellulaire avec sa propre puce) et ce service n’est opérationnel qu’en Allemagne avec un déploiement progressif prévu sur les autres pays européens.
Nous ne pouvons qu’encourager cette initiative et cette technologie française (et Toulousaine !) et dire à nos adhérents : installez l’application « Liberty Rider » sur votre smartphone car elle peut déjà, aujourd’hui en France et gratuitement, vous sauver la vie !
A l’AFMB nous allons suivre de près cette petite structure Toulousaine dont les solutions promettent de faire de l’ombre aux plus grands !